Le Congo reste un pays particulier dans son fonctionnement : ses élites sont capables de penser au fonctionnement d’un futur État de droit et même de légiférer sur tous les problèmes que peuvent rencontrer les congolais. Cependant, ces textes légaux qui régissent diverses matières de la société souffrent souvent d’un manque d’application effective, faute de décrets, de budgets conséquents ou simplement de volonté politique.
Si le congolais pouvait se prévaloir de tous les textes légaux, il vivrait surement dans un Etat où règnerait la justice, l’équité, paix etc… ce que d’aucun pourrait assimiler à un pays parfait.
La question de la couverture sanitaire universelle suit pour le moment, le même parcours que la plupart de questions sociétales qui doivent être réglées à l’initiative de l’État. La couverture soins de santé universelle veut dire :
- Pour être efficace, fournir à toutes les personnes un accès aux services de santé de qualité suffisante dont elles ont besoin notamment : la prévention, la promotion, le traitement, la rééducation et les palliatifs.
- S’assurer que l’utilisation de ces services n’expose pas les bénéficiaires à des difficultés financières.
De cette définition, il est évident que la matérialisation des ses attributs est loin d’être une réalité en République Démocratique Congo, ceci pouvait être le cas si les lois en vigueur étaient effectivement appliquées. Nous pensons notamment :
- À l’article 178 du code de travail, qui oblige les employeurs à fournir les soins médicaux aux travailleurs et aux membres de leur famille durant toute la période contractuelle,
- · À la loi du 8 février 2017 sur le fonctionnement de mutualité[1],
- · À l’article 134 de la Loi du 15 janvier 2013 portant Statut du militaire des Forces armées[2],
- · Et surtout La loi du 13 décembre 2018 fixant les principes fondamentaux relatifs à l’organisation de la santé publique.
Les trois premières législations ayant déjà été abordées dans nos précédents articles, nous allons jeter notre dévolu sur la loi du 13 décembre 2018.
Une loi de plus, qui aborde la question de l’assurance maladie universelle. À la différence des autres législations, cette dernière loi définit clairement la couverture sanitaire et pose le socle sur lequel cette couverture universelle doit être construite. Elle prévoit la création d’un Fond de Solidarité de la santé destiné à financer la couverture sanitaire universelle.
Ce Fonds de Solidarité sera alimenté par le Budget national, les assurances de tout régime d’assurance-maladie, les legs et les donations. Il est également prévu la possibilité pour l’Etat de créer une taxe pour financer ce fond de solidarité.
Néanmoins, cette législation ne répond pas toujours aux questions du financement. La problématique reste opaque pour tous les citoyens. La loi prévoit une couverture universelle mais l’État ne met pas assez de moyens ou n’adapte pas son espace budgétaire.
À peine 8,8 % du budget de +- 5 milliards de dollars de l’exercice budgétaire précédent[3] et 5,6% pour une prévision budgétaire de +- 10 milliards pour 2020[4] sont consacrés à la santé. On est encore loin de 35 à 40 (dollars minimum) par habitant et par an, recommandé par L’Organisation Mondiale de la Santé[5] pour assurer les services de santé essentiels.
En d’autres termes, la prévision budgétaire la plus élevée ne consacrerait que +- 560 millions de dollars à la santé alors que le minimum pour une population de plus de 90 millions d’habitants serait de plus de 3 milliards des dollars selon les chiffres de L’OMS
En outre, cette loi du 18 décembre 2018 ne consacre pas non plus, une assurance maladie obligatoire pour tous les congolais.
Nous sommes convaincus, que le point départ d’une couverture sanitaire universelle en RDC sera d’une part, le vote d’une loi qui obligera tous les congolais à s’assurer pour les soins de santé. (Ce qui va contraindre l’État à payer pour ceux qui n’ont pas les moyens). Et d’autre part la capacité de mobilisation des ressources financières.
C’est pourquoi, nous militons en tant que défenseurs du droit à la santé (CRAMU), pour que la RDC réalise certains objectifs qui vont précéder l’implantation d’une couverture sanitaire universelle notamment:
La réhabilitation de notre système de santé qui était un des systèmes de référence à la sortie de la colonisation, la réorganisation de l’espace budgétaire, un financement progressif, la priorité aux populations faibles et aux soins primaires. C'est-à-dire une couverture des soins de santé par étape.
Patrick Ndjadi Ombombo
Expert en Couverture Soins de SantéDéfenseur du Droit à la Santé
patrickndjadi@cramurdc.org
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